L’ennui, à la différence de
l’apathie, ce n’est pas le fait d’être blasé de la vie et de n’avoir plus envie
de rien.
Contrairement à ce qu’on pourrait
penser, l’ennui n’est pas un mal contemporain, né avec l’augmentation du temps
libre et du divertissement.
Selon Peter Toohey, historien
spécialisé dans l’époque gréco-romaine, « l’ennui a en fait une très
longue histoire. Sur les murs de Pompéi, il y a des graffitis latins sur
l’ennui qui datent du Ier siècle. »
Mais la différence, entre
l’Antiquité et maintenant, c’est qu’aujourd’hui, on ne sait plus s’embêter
comme il faut.
L’ennui est devenu une chose
terrifiante à laquelle il nous faut remédier par n’importe quel moyen, dès
qu’elle pointe le bout de son nez. Essayez de vous souvenir…
C’est quand la dernière fois que
vous n’avez rien –mais vraiment rien– fait, au point de vous ennuyer à mourir
?
Dans le métro, dans la file
d’attente du supermarché ou même pendant une réunion de travail bien barbante,
on a toujours nos smartphones ou nos tablettes à la main.
Dès qu’une demie seconde
d’inactivité nous est offerte, on saute sur l’occasion pour aller vérifier
notre compte Facebook ou pour jouer à Angry Birds.
Au quotidien, les nouvelles
technologies, la télé, la radio, le travail et les loisirs nous stimulent en
permanence à tel point que lorsque l’on n’a plus rien à faire, la panique prend
le dessus.
Résultat : on cherche constamment à
tuer cet ennui qui nous fait tellement flipper.
Le problème c’est qu’à force, on
finit par passer à côté des bienfaits de l’ennui, car oui il y en a.
Se poser seul, chez soi, sans
aucune occupation ou distraction, oui c’est parfois angoissant.
Pourtant ces instants sont très
importants pour reposer notre cerveau et laisser libre cours à nos pensées et à
notre imagination.
Une étude réalisée en 2013 par deux
chercheurs britanniques a d’ailleurs démontré l’importance de l’ennui dans le
développement de la créativité.
Selon les résultats de ces
recherches, les personnes qui accomplissent un travail ennuyeux avant de passer
à une activité créative, réussissent bien mieux cette deuxième tâche que les
gens qui se lancent directement dans un exercice d’imagination. Pourquoi ?
Parce que quand on est occupé à faire un boulot purement automatique, on laisse
notre esprit vagabonder et réexaminer par exemple des difficultés qu’on a
rencontrées.
C’est pour cette raison que de
nombreux experts sont d’avis qu’il faut permettre aux enfants de s’ennuyer de
temps en temps plutôt que de les occuper constamment en les mettant devant une
télévision ou un ordinateur.
Ce n’est pas parce qu’on ne sait
pas quoi faire qu’on va devenir une véritable loque.
C’est même plutôt l’inverse, plus
on s’ennuie, plus on va chercher à aller vers les autres, à être altruiste et à
développer un comportement prosocial.
S’ennuyer peut aussi nous permettre
de développer de nouveaux hobbies, de rencontrer de nouvelles têtes. Dans tous
les cas, ça signifie sortir de sa bulle.
Oubliez les préjugés comme quoi
l’ennui mène à la dépression.
Ne rien avoir à faire présente en
fait beaucoup d’avantages pour notre santé physique et mentale. Surtout parce
que lâcher son téléphone et son PC de temps en temps permet d’éviter de devenir
accro aux technologies.
Des chercheurs ont ainsi découvert
que l’impossibilité de vérifier son smartphone régulièrement peut d'abord être
une source de stress et d’anxiété, mais se débarrasser de cette stimulation
constante provenant de nos gadgets high-tech, permet de mieux dormir, d’être
plus reposés et sereins.
L’ennui sain (car il existe un
ennui pathologique propre à certaines dépressions à l’adolescence par exemple)
redonne de l’espace à notre monde intérieur, et le désamorce si nécessaire.
Il faut apprendre à l'apprivoiser
en douceur, sans le rechercher, mais juste de ne pas le fuir lorsqu’il
s’invite dans notre vie.
Comment faire de l’ennui, un temps
pour soi, une parenthèse dans ce monde agité, un moment de connexion avec son
moi profond ?
En éteignant la télévision (ou
l’ordinateur), en laissant loin de soi tout ce qui est susceptible de nous
distraire (téléphone portable, grignotage, lecture en diagonale…), en
s’asseyant dans un fauteuil et en attendant.
L’ennui est nécessaire, tout comme
la musique n’a de sens que parce qu’il y a des silences entre les notes.
Ainsi, nous ne pouvons trouver le
sens de notre vie qu’en laissant des moments de vide, de creux, entre des
instants d’actions.
« J’ai découvert que tout
le malheur des hommes vient d’une seule chose, qui est de ne savoir pas
demeurer en repos dans une chambre. » Pascal
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