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Danser sur la Nère
Dimanche 04 octobre 1835
À peine l'aube était-elle parue que le chant du coq et le tic-tac de la grosse horloge se mêlèrent à la voix assourdissante de Jean-Baptiste qui s'apprêtait à sortir de la maison avec ses fils. Il profitait de son unique jour de congé hebdomadaire pour rabouiller les écrevisses dans la Nère. Rabouiller, c'est agiter l’eau de la rivière en la faisant tournoyer vigoureusement à l’aide d’une grosse branche. Ainsi, les écrevisses, effrayées par tout ce tapage, ne savent plus dans quel sens nager et remontent précipitamment le cours d’eau pour se jeter dans le filet tendu par les pêcheurs.
Engourdie par la douce chaleur de son édredon, Montaine s'enfonça davantage dans les profondeurs de sa paillasse rebondie. Elle aurait aimé accompagner ses frères, plutôt que de suivre sa mère et ses sœurs à l'église Saint-Martin. Car même si elle aimait bien son portail d'inspiration romane, elle abhorrait ses bancs austères et la messe prêchée en latin. Elle préférait de loin entendre Dieu lui parler dans les bois solitaires, et lire la bible avec son amie Pauline, perchée entre deux branches de chêne. Incontestablement, Montaine préférait la nature à cette paroisse froide aux offices mortifères.
- I reste cheu nous cuire la mangeaille[1] ! cria-t-elle à sa mère qui quittait la petite masure aux pans de bois couverts de torchis.
C'était sa façon de la saluer et de l'avertir qu'elle était bien réveillée ; mais Anne Jully savait bien que sa fille aînée traînerait au lit pour rêvasser, avant de préparer le repas dominical. Ainsi, dès que la porte de la vieille masure se referma, Montaine se plongea avec nostalgie dans ses souvenirs d'enfance, frustrée de ne plus pouvoir suivre les hommes au bord de la Nère qu'elle aimait tant. Elle aurait seize ans demain, et bien qu'il ne fût pas de coutume de fêter les anniversaires[2], elle savait qu'elle n'avait plus l'âge d'aller rabouiller avec son père. Alors, elle se remémora le temps où elle était encore la cadette de la famille, et qu'elle l'accompagnait, assise dans la brouette chargée d’herbes fraîches et moelleuses. C'est près de cette rivière qu'elle avait appris à aimer la nature et à lui ouvrir tous ses sens. C'est là qu'elle avait fait ses premiers pas, en observant les escargots gluants, en cueillant les champignons couverts de rosée et en se piquant aux pissenlits dentés. Comme une petite naïade virevoltante au cœur des graminées échevelées, elle s'amusait alors à effleurer les écrevisses et les truites arc-en-ciel, le visage barbouillé de mûres et de framboises écrasées.
S'enfonçant sous son édredon, elle se rappela avec délices la chaleur des rayons du soleil sur sa peau, qui traçaient des arabesques sur les flots, en l'éblouissant de lumière et de frémissements éphémères. Elle aimait tant observer les étranges ballets aquatiques des libellules bleues, les chorégraphies aériennes des akènes à aigrettes et la danse des punaises d’eau qui semblaient patiner sur les eaux claires et froides. À cette époque, elle posait avec délice ses pieds nus sur les gros sabots de bois de son père, qui lui apprenait à valser dans les prairies couvertes de rosée. Et elle s'en donnait à cœur joie, se cramponnant de toutes ses forces à sa taille, alors qu'il la guidait au rythme de ses chants virevoltants. Abandonnée dans ses bras puissants, elle se sentait aussi légère qu'une libellule emportée dans les tourbillons de vents. C'était un temps d'insouciance où sa foi était toute aussi simple que ses jeux d'enfant ; un temps où elle avait une confiance aveugle en Jésus, comme si elle pouvait poser ses pieds sur les siens pour virevolter sur les flots de son monde en toute quiétude. Sa vie n'était alors qu'un long fleuve tranquille. Mais Montaine avait grandi et sa famille avait accueilli quatre autres enfants après elle. La fièvre avait emporté Marguerite, et avec elle, la joie et la douce insouciance de ses jeunes années. À sa façon, la jeune fille avait vécu des pêches miraculeuses, et elle avait appris à marcher sur les eaux, mais comme le célèbre apôtre Pierre, elle avait aussi sombré à cause de la tempête. Certes, Dieu l'avait rattrapée, mais elle avait aujourd'hui beaucoup de difficultés à sortir avec confiance de sa barque pour atteindre d'autres rivages.
Perdue dans ses réflexions, elle ferma un instant les yeux pour mieux se rappeler les ritournelles qu'elle chantait autrefois à tue-tête. Et ses souvenirs la ramenèrent inexorablement à un rêve étrange qu'elle avait fait peu avant le décès de sa sœur : elle avait vu Jésus qui intercédait, assis sur les eaux d’un grand étang, la tête posée sur ses genoux repliés. Elle s'était assise en face de lui, en silence, alors qu'elle entendait sa famille et ses amis chanter dans le lointain. Son regard avait croisé celui de Jésus qui venait de relever la tête ; lui aussi prêtait l'oreille à ces joyeuses rengaines. Il semblait partager leur joie et souriait avec tendresse. Elle n'aurait jamais imaginé qu'il puisse réagir ainsi, et craignit que cette clameur n'ait perturbé son intercession.
- Ils chantent faux ? lui avait-elle demandé embarrassée.
- Non, ils chantent juste, de tout leur cœur, de toute leur âme et de toutes leurs forces. Le reste a peu d'importance, avait répondu Jésus.
Elle avait souri, gênée d'avoir émis ce jugement, mais heureuse de le voir si clément.
- J'aime leur enthousiasme, avait-il ajouté en se levant sur les eaux et en lui tendant la main, afin qu'elle se lève à son tour. M'accorderais-tu cette danse ?
- Avec plaisir, lui avait-elle répondu, consciente du privilège qu'il lui accordait.
- Cela fait partie des leçons sur l'eau, lui avait-il chuchoté à l'oreille.
- Comme les pêches miraculeuses et l'apaisement prodigieux des tempêtes ? avait-elle songé en son for intérieur.
- Exactement, avait-il souri, en lisant dans ses pensées. Nous nous promènerons ensemble en musique sur ces eaux. Laisse-moi te guider.
Il avait alors fermement empoigné sa main et joué de tout son poids dans la marche.
- J'ai la tête qui tourne ! avait-elle rapidement protesté.
- Parce que ton regard ne fixe pas le mien, l'avait-il repris avec fermeté. Il s’agit d’une sorte de dialogue dansé qui implique une ouverture vers l’autre.
- Je ne connais pas ces pas ! avait-elle objecté, en freinant la cadence.
- Ne cherche pas à les deviner ni à trouver une logique, avait-il poursuivi sans s'arrêter. Laisse-moi mener la danse et abandonne-toi complètement entre mes mains.
- Je comprends maintenant pourquoi tu parlais d'une leçon sur les eaux. Ce n'était pas un moment récréatif, mais une leçon d'obéissance et d'abandon total, rechigna-t-elle. Tu te venges, parce que tout à l'heure, je t’ai dit que ma famille et mes amis chantaient faux !
- Je ne me venge pas, avait-il répondu, amusé. Mais toi, tu danses faux, parce que ton cœur n'est pas en totale harmonie avec le mien.
- Comment veux-tu que je te suive ? Tu vas trop vite et tu changes sans cesse de rythmes et de directions ! s'était-elle justifiée, en ne comprenant pas ses reproches.
- Il ne s'agit pas de fermer les yeux ni de te transformer en marionnette entre mes mains, lui avait-il expliqué. Mais, sois confiante, et écoute mon cœur pour être dans une osmose intentionnelle avec moi.
- Ce n'est pas simple ! avait-elle objecté. T'écouter en marchant à tes côtés, c'est une chose ! Mais danser, c'en est une autre et je ne suis pas douée pour cela.
- C'est un moment privilégié que tu apprécieras lorsque tu seras parvenue à me suivre parfaitement. Tout est une question de révélation et d'abandon. Ta maturité se révèlera quand tu seras pleinement à l'aise avec mon imprévisibilité. Mais, on reprendra cette leçon une autre fois, avait-il conclu, alors que les chants avaient cessé dans le lointain.
Montaine s'était alors réveillée, confuse et déçue de ne pas avoir su profiter de ce moment privilégié avec lui. Et pendant que tous ces souvenirs se bousculaient dans son esprit, elle s'assoupit et se retrouva encore une fois, debout sur l'étang, face à Jésus.
- Reprenons là où nous en étions restés, lui dit-il, en lui tendant une nouvelle fois la main pour l'inviter à danser.
À cet instant, la jeune fille, interloquée, réalisa qu'elle n'avait plus de jambe, ou plutôt, que ses jambes et celles de Jésus avaient complètement fusionné. Était-ce pour cette raison que pendant qu'elle avait souffert de la fièvre[3], elle n'avait plus la force de marcher ? Sans qu'elle en prenne conscience, il lui avait enseigné à ne plus compter sur ses propres forces, mais sur les siennes. En y repensant bien, elle comprit que cette maladie lui avait aussi appris à renoncer à son propre rythme, à ses ambitions et à ses rêves. Bouleversée, elle posa sa main gauche sur sa taille qui avait été blessée par la lance d’un soldat, et glissa sa main droite dans sa main qui avait été percée à la croix. Ses yeux ne pouvaient se détacher de son regard plein d'amour, et son cœur se mit à battre au diapason du sien. Aussitôt, ils se mirent à danser sans aucun souci de synchronisation, de rythme ou de direction. C'était une danse d'unité parfaite, pleine d'amour et de joie, légère, aérienne et fluide. Rien de comparable avec la dernière fois. Et alors qu'ils valsaient, des gouttes d'eau mêlées d'huile tombèrent du ciel, comme autant de paroles de vie, guérissantes et restauratrices. Peu à peu, la vision s'estompa… L’esprit embrumé, Montaine revint peu à peu à la réalité de sa modeste chambre, et une pensée s’imposa à elle : l'image d’un cep et de sarments lui fit comprendre mieux que jamais ce que signifiait devenir une même plante avec Christ[4].
Encore une fois, Montaine n'avait pas vu le temps passer et les onze coups, sonnant à l'horloge, la sortirent brusquement de sa torpeur. Sautant du lit tel un ressort, elle s'habilla et se coiffa rapidement, remit du bois dans la cheminée presque éteinte, et alla jusqu'au puits chercher un seau d'eau. Elle le déversa dans la marmite pendue au-dessus de l'âtre, et pantelante, courut au cellier choisir des oignons et des carottes, qu'elle plongea dans l'eau. Puis, elle éplucha des pommes de terre pour confectionner une galette. Elle savait qu'il lui restait peu de temps avant que toute la famille rentre ; c'est pourquoi elle mélangea farine, œufs, sel et beurre à la hâte en attendant que les pommes de terre soient cuites. Puis, elle les écrasa à la fourchette et les incorpora à la pâte. Pliant, roulant, beurrant, dorant à l'œuf et quadrillant, elle fit voltiger la farine autant sur la table que dans sa chevelure éparse, avant d’enfourner la galette à la hâte. Le court-bouillon n'attendait plus que les écrevisses, qui y seraient jetées vivantes. Elle espérait que ses sœurs aient cueilli des mûres sur le chemin du retour, ou que ses frères aient ramassé quelques noisettes autour de la rivière, pour improviser un dessert. Elle souhaitait tellement qu'ils rentrent tous de bonne humeur, le sourire aux lèvres et le cœur en fête, pour profiter de ce dimanche en famille.
Sa prière fut exaucée. Alors qu'elle s'évertuait à dresser une jolie table, elle entendit le babillage de ses sœurs, et leurs pas approcher sur le seuil de la petite demeure. Bien qu'elle portât une modeste robe de deuil et un grand châle ajusté sur ses épaules affaissées, Anne Jully semblait apaisée, comme portée par les gazouillis joyeux de Justine. Quant à Marie, elle arborait un large sourire, fière de rapporter à sa grande sœur un panier rempli de baies juteuses. Les petites filèrent dans leur chambre pour ôter leurs robes de gros drap bleu de Prusse ; et elles enfilèrent leurs blouses, pendant que leur mère vérifiait la cuisson de la galette préparée par Montaine.
- V'là los baufreux que s'en venont tout nileux[5] ! s'écria-t-elle en allant décharger les hommes du lourd panier d'écrevisses.
- Aga l'pain de cuisse dé lo Sylvain[6] ! fit remarquer le père en arborant fièrement un pain de ménage croustillant à souhait.
Jean-Baptiste espérait taquiner sa fille en parlant du jeune boulanger auquel il aurait souhaité la marier. Mais l'adolescente ne sourcilla pas, de peur de gâcher cette magnifique journée. Son père savait ce qu'elle pensait du fils du meunier, qu’elle surnommait l’couriaud[7]. C'était un jeune homme de cinq ans son aîné, plein d'ambitions, qui projetait de s'installer à la capitale pour y faire fortune. Montaine n'était pas intéressée. Jamais, elle ne laisserait son Berry, ses landes et ses solognots ; jamais elle ne partirait loin des siens et de sa campagne bien aimée. Dans la famille du père Chollet, ce n'était ni pour Augustin ni pour Sylvain que son cœur battait, mais pour leur frère cadet : Jean Victor, le jeune meunier de dix-sept ans.
- T'as bein chaudronné, ma gazille ? N'avons los foies chauds[8] ! l'interpella Etienne, pendant que la jeune fille s'activait au-dessus de la marmite pour cacher la rougeur de ses joues.
- Quitte ton paletaud, tu voés bein qu't'as trop chaud[9] ! répliqua-t-elle en ébouriffant les cheveux drus et hirsutes de son jeune frère.
Etienne ôta de ses poches de pleines poignées de noisettes, qu'il déposa sur la table, avant d'abandonner son manteau de laine détrempé devant la cheminée. La jeune fille aimait les frimousses de ses petits, avec leurs cheveux blond vénitien et leurs yeux bleus comme un ciel d'été, leurs taches de rousseur et leur teint laiteux qui rougissait au moindre changement de température. Un sentiment de plénitude la traversa alors que son regard se posait sur chacun d'eux, et qu'elle faisait monter jusqu'aux cieux une action de grâce silencieuse.
- J'aime leur enthousiasme contagieux ! pensa-t-elle, en retirant du feu la marmite de crustacés qui bouillonnait.
Fourbu, le père s'attabla et commença à briser quelques noisettes dans les trous de la table creusés à cet effet :
- Aboite mé la cormé[10] ! demanda-t-il à Montaine, en lui tendant une modeste coquelle[11] de bois, qui semblait se perdre dans son immense main calleuse.
Jean-Baptiste était un homme à l'allure imposante, rustre et robuste. On remarquait à peine le bleu profond de ses yeux, tant son visage buriné par le soleil se cachait sous une lourde tignasse de cheveux bruns coupés au couteau et une moustache broussailleuse. Contrairement à Montaine, il n'avait aucun goût pour la rêverie, la contemplation ou la spiritualité. Il comptait sur son pragmatisme, allié à un sens aiguisé du travail et des responsabilités, pour surmonter toutes ses épreuves. Toute sa vie tournait autour de sa ferme et des champs qu'il s'était acquis au prix d'un dur labeur, autour de la famille qu'il s'était construite, et de la Nère qui marquait les limites du territoire cher à son cœur. Jean-Baptiste ressemblait à une bête de somme : un taiseux, rustaud et taciturne, capable de tirer son foyer, avec force et courage, dans les droits sillons de sa terre natale. Mais il ne faisait jamais preuve de tact ou d'amabilité, de compassion ou de sensibilité. En cela, son fils aîné n'avait rien à lui envier. C'était le portrait tout craché de son père ; et ces deux-là avaient toujours été inséparables, jusqu'au moment où Baptiste avait été appelé sous les drapeaux du roi. Ce jour-là, le père Gaugue s'était senti à la fois fier d'envoyer son fils à la guerre, et démuni d'un solide et précieux assistant. Car même si son second garçon travaillait avec ardeur, il n'avait pas avec lui la même connivence. Pierre était un jeune homme laborieux sur lequel il pouvait compter, mais il n'était ni grossier ni taciturne. Il prenait soin de sa mère et de ses jeunes sœurs avec douceur et respect, apaisant la rudesse de leur vie par ses attitudes prévenantes, et ses sourires bienveillants. Les traits réguliers de son visage, encerclés de boucles aux reflets cuivrés, étaient illuminés d'un regard bleu-gris affable et profond, qui rassurait spontanément tous ceux qu'il regardait. Pierre était très proche de Montaine, et la jeune bergère se plaisait à marcher dans son sillage. C'est lui qui lui avait appris à garder le troupeau de solognots, et lui encore qui lui avait ouvert la porte de la famille Chollet. Il faut dire que Pierre était amoureux de Pauline, la fille du meunier, qu'il comptait épouser à sa majorité[12]. En leur compagnie, Pierre et Montaine avaient autant appris à vivre dans une atmosphère pieuse, chaleureuse et bienveillante dont ils ne pouvaient pas profiter chez eux.
Bien qu'ils aient perdu quatre enfants, Sylvain et Catherine Chollet avaient conservé un amour, une joie et une paix surpassant toute espérance. Ils puisaient leurs forces dans le Dieu de la bible, et ce livre avait une place primordiale dans leur foyer. Ils avaient un rôle central dans la vie de leur bourgade, car leurs affaires prospéraient et ils étaient toujours de bon conseil. Le père Chollet était propriétaire de son moulin. Son fils aîné, Augustin, cultivait le blé et était farinier. Sylvain, son cadet, était devenu boulanger et les plus jeunes fils aidaient leur père en apprenant le métier de meunier. Montaine aimait se retrouver au sein de ces fervents chrétiens, qui restaient discrets au sujet de leur foi. Il faut dire qu'ils étaient le seul foyer protestant des environs, alors ils ne revendiquaient pas leurs croyances, au risque d'être rejetés du voisinage, auquel ils rendaient pourtant de grands services. Pauline, la seule fille de la fratrie, était devenue sa meilleure amie ; c'est elle qui lui avait appris à lire et à compter, à prier et à découvrir la vie sous des perspectives qu'elle n'avait jusqu'alors jamais soupçonnées. Elle aurait aimé que Dieu révèle à ses parents la foi de ces gens-là, mais ils n'étaient pas prêts. Son père ne voulait pas entendre parler de bondieuseries, et sa mère, bien qu'elle aille encore à la messe, avait l'âme aussi vide et glacée qu'un long hiver enneigé.
Perdue dans ses pensées, l'adolescente poussa un profond soupir de lassitude, mêlé d'espoir. Elle aurait tant voulu que tout ce qui était vulnérable soit fortifié, que ce qui était chaotique retrouve l'ordre originel, que ce qui était confus retrouve sa clarté, et que tout ce qui s'agitait retrouve la paix. Elle savait par expérience que le monde, tel qu'elle le connaissait actuellement, était en souffrance, comme dans les douleurs de l'enfantement. Ces tourments n’étaient pas seulement celles des tempêtes, des famines, des épidémies, des canicules ou des grands froids, mais des luttes pour survivre à la corruption des hommes déchus. Elle savait pertinemment que le péché était la cause de tous les malheurs de la terre, de toutes les larmes, de tous les gémissements, de toutes les angoisses et de toutes les souffrances. C'est pour cette raison, qu'avec la création, la jeune fille soupirait après un renouvellement et une complète rédemption. Ainsi, même si elle se sentait protégée et gardée par son Père céleste, elle réalisait que son réconfort résidait davantage dans l’espérance des choses à venir que dans les plaisirs éphémères. Elle devait veiller à ce que son espérance ne soit pas détournée par des attentes dérisoires, et que son ardent désir de la gloire céleste ne se mue pas en lassitude. Elle avait incontestablement besoin de patience, car son chemin allait être long et difficile. Pour le moment, elle n'était encore que l'ombre de ce qu'elle allait devenir ; mais comme la chenille devient papillon, elle savait qu'un jour, elle serait complètement métamorphosée, et qu'alors, elle pourrait parfaitement danser aux bras de son divin bien aimé.
[1]En berrichon : "Je reste chez nous pour préparer le repas."
[2]Les anniversaires ont commencé à être souhaités en France après la Révolution française, mais seulement dans les familles les plus aisées. Pour le reste de la population, on ignorait les dates de naissance. À la place, on honorait le jour des saints patrons dont on portait le prénom. Les célébrations étaient collectives et placées sous l’égide de l’Église catholique.
[3]Ce qu'on appelait "fièvre", était en réalité le paludisme, lié à l'infestation de moustiques dans les marais, responsable d'une forte mortalité infantile, d'avortements et d'accouchements prématurés.
[4] D'après l'épitre de Paul aux Romains 6.5.
[5] En berrichon : "Voilà les gros mangeurs qui arrivent couverts de boue."
[6] En Berrichon : "Regarde le pain de ménage fait par Sylvain !"
[7] En berrichon : Coureur de filles.
[8]En berrichon : "Tu as bien cuisiné, jeune fille ? On a faim !"
[9]En berrichon : "Enlève ton manteau, tu vois bien que tu as trop chaud !"
[10]En berrichon : "Sers-moi généreusement du cidre de cormes !"
[11]En berrichon : Gobelet.
[12] La majorité matrimoniale, à cette époque, était de 25 ans pour les hommes et de 21 ans pour les femmes.
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