mardi 20 août 2024

7. L'école, faubourg d'Illiers

 

Chapitre 7

 

L'école, faubourg d'Illiers

 


"Si tu peux rencontrer triomphe après défaite

et recevoir ces deux menteurs

d'un même front.

Si tu peux conserver ton courage

et ta tête quand tous les autres les perdront."

Rudyard Kipling

 

Au XIXe siècle, les instituteurs étaient contraints par leur hiérarchie d'écrire des monographies sur la vie quotidienne de leur classe et de leur localité. Ces archives autobiographiques, chroniques d'une école ou journal intime d'un instituteur, longtemps demeurés privés ou cachés dans des greniers, dévoilent ainsi des pans entiers d'une histoire collective, qui peut aujourd'hui non seulement satisfaire notre curiosité, mais aussi nous édifier. Ainsi, en découvrant les détails décrivant la nouvelle école normale de Chartres[1], nous pouvons comprendre combien la richesse de ses enseignements et la personnalité de ceux qui les dispensaient ont pu impacter les élèves qui en bénéficièrent.

En octobre 1840, Jean-Baptiste Person put enfin entreprendre le déménagement de l'école, au faubourg d'Illiers. Telle qu'elle était en cette première rentrée, cette école n'avait pas coûté la somme que l'on dépense ordinairement pour installer une simple école primaire dans un chef-lieu de canton. Et pourtant, même si la distribution intérieure était d'une extrême simplicité, elle paraissait déjà spacieuse pour ce temps-là. Dans les mansardes et sous le toit en tuiles, on trouvait deux petites chambres pour les domestiques, une infirmerie, et deux greniers pour étendre le linge, sécher les graines et abriter les malles des élèves. A l'étage, au milieu même du bâtiment, on trouvait trois pièces où le directeur habitait, avec sa femme et ses parents. De chaque côté de son appartement, des portes ouvraient symétriquement sur les paliers de deux escaliers, distribuant à droite et à gauche les dortoirs, dont l'un était resserré par une petite lingerie[2]. Au rez-de-chaussée, se trouvaient le bureau du directeur, une bibliothèque, le réfectoire, la cuisine, la salle d'études et l'amphithéâtre de musique. Ce bâtiment central avait deux petites ailes qui ne comprenaient qu'un rez-de-chaussée. L'une était une école annexe où étaient reçus gratuitement les enfants du quartier, et l'autre une salle de conférences où l'on faisait du dessin, et où l'on préparait les collections et les leçons de choses[3]. Au fond d'une cour étroite, derrière la cuisine, se trouvait encore un petit bâtiment, abritant le bûcher[4], la buanderie[5] et le fournil, d'où sortait chaque semaine une abondante provision de pains savoureux.

Une fois en possession de ces bâtiments, le jeune directeur et son épouse se mirent à les décorer, suivant un plan bien arrêté. Le directeur dirigeait tous ces aménagements avec une telle ardeur et un tel désir de bien faire les choses, qu'il enflamma une foule d'élèves à ses passions. Il faut dire que la symétrie et la décoration étaient, pour ainsi dire, la forme même et le pli de son esprit, de ses pensées, de ses discours et de ses leçons.

Alors, avec sa jeune épouse et le concours des élèves, il couvrit, à ses frais les moindres recoins, de tableaux, de cartes et d'inscriptions pédagogiques. Avec un peu d'huile et de couleur, de colle, de papier et d'encre de Chine, ils donnèrent aux couloirs et aux salles de l'établissement, des aspects variés, interpellant à la fois les yeux et la pensée. On pouvait ainsi admirer sur chaque mur, de grandes cartes de la commune, du département et de la France ; plus loin, des tableaux des règnes animal et végétal ; aux plafonds de grands cercles où étaient représentées les planètes, dans les proportions de grosseur et de distance voulues, et la carte du ciel avec ses constellations. Dans la petite bibliothèque, qui servait également de cabinet de physique, une grande vitrine contenait des animaux et des oiseaux, que les élèves avaient empaillés eux-mêmes. Dans les couloirs, des boîtes renfermaient une belle collection de papillons et de coléoptères, dont chaque individu était piqué à la place assignée avec son nom, et par famille. Et même dans le bureau du directeur, se trouvaient des fragments de poteries romaines, des coquillages fossiles et des ossements antédiluviens[1], rappelant aux visiteurs qu'il était possible de faire de précieuses trouvailles archéologiques aux alentours de Chartres. Dans la salle de conférences, on pouvait admirer une impressionnante collection d'échantillons du sol, que chaque élève avait rapporté de sa commune au retour des vacances, ainsi qu'une magnifique variété de blés, d'orges et d'épeautres cultivés et récoltés à l'école.

Même si sa soif insatiable de connaissances, et sa personnalité fantaisiste furent décriées par ses adversaires libertaires[2], Jean-Baptiste fit prospérer son affaire, dès cette première année au faubourg d'Illiers. Avec le concours des différents professeurs et élèves, tout dans cette école changea rapidement d’aspect. En effet, les bâtiments, autrefois impersonnels et froids, abritèrent bientôt une pépinière de talents divers et une grande famille pleine de vie et d'amitiés sincères. Croissant sous la houlette avisée du Grand Berger[3], l'école administrée par Jean-Baptiste Person prit un véritable essor. Pendant trente ans, c’est-à-dire jusqu'à la guerre de 1870, l'institut connut son âge d'or, et forma avec succès une multitude d'excellents instituteurs, dont Augustin, et plus tard son fils Marc Emmanuel[4], firent partie.

Les leçons de dessin, de grammaire et de choses établies par les professeurs de cet établissement furent renommées dans la France entière. Elles reçurent même des distinctions lors de l'exposition universelle de Paris en 1867. Il faut dire que le directeur avait adopté, pour l'enseignement de toutes les sciences et de tous les arts, un système de tableaux et d'accolades qui permettaient de saisir rapidement l'ensemble d'un sujet, de ses prémisses à sa conclusion, sans jamais s'y perdre. Cette méthode donnait, immanquablement, de l'intérêt et de la clarté à toutes ses leçons. Et c'est pour cette raison, que ses élèves lui avaient donné le surnom affectueux de Père l'Accolade. Jean-Baptiste fut un instrument de bénédictions, et une véritable source d'inspiration pour plusieurs générations de normaliens. A tel point qu'Augustin aimait à penser que des flots de diamants, de pétales de roses et de miel sortaient de sa bouche.

Plus d'une fois, Augustin réfléchit à cette analogie imagée. Et un jour, lors d'une leçon de choses, il comprit la préciosité de ces paroles, à la fois édifiantes, instructives et réconfortantes :  

- Qu’est-ce que le diamant ? demandait alors le jeune directeur à ses élèves, en brandissant sous leurs yeux un boulet de charbon. C’est ce qu’il y a de plus précieux et de plus cher au monde. Qu’est-ce que le charbon ? C’est la matière usuelle la plus commune et une de celles que l’on trouve en dépôts immenses dans les entrailles de la terre. En même temps que les plantes, les arbres de toute espèce en contiennent une inconcevable quantité. L’argent peut à peine payer le diamant, tandis qu’une quantité égale de charbon n’a, même avec les pièces de cuivre les plus petites, aucune valeur assignable. Et cependant le diamant et le charbon sont identiques : le diamant n’est que du charbon cristallisé ! On appelle cristaux ces produits géométriques réguliers de la nature. Ils sont à faces lisses et polies, avec des arêtes droites et bien dressées. Ils offrent des plans parfaits, tels que l’acier tranchant ou la roue du lapidaire n'aurait pu les produire. De plus, ils sont transparents comme l’eau pure, le verre ou le cristal de nos verreries. Pour créer la plus précieuse des pierres, réalisez que Dieu géométrise sans cesse, afin que la nature se livre à des opérations exactes et précises dans les profondeurs de la terre. Imaginez-vous que dans sa gloire, Dieu transforme sous le feu de l'épreuve de misérables charbons en diamants ?

Augustin trouva là une explication à ses réflexions au sujet de son ami directeur. Puisque c'est de l'abondance du cœur que la bouche parle[5], il avait fallu que ce cœur soit profondément épuré aux feux des épreuves, pour produire des paroles aussi droites, pures et précieuses que des diamants. En outre, malgré sa rigueur et ses exigences, Jean-Baptiste Person était aussi un réel modèle d'amour inconditionnel, juste et franc. Il possédait un tel tact, qu'il était capable d'adoucir le plus rustre des enseignants ou l'élève le plus coriace. Comme le roi Bernadotte[6], il savait gouverner avec une main de fer dans un gant de velours. Définitivement, il était une vivante illustration de cette vérité biblique, affirmant que les paroles dépendent de ce qui remplit un cœur.

- Son être profond doit contenir tant de diamants, de pétales de roses et de miel, pour qu'il jaillisse de ses lèvres tant de grâces et de bénédictions, pensait Augustin, qui se délectait de ses mots, et en faisait des réserves pour les semaines, les mois et les années à venir.

Les roses, le jeune normalien les connaissait depuis que les élèves avaient planté des rosiers grimpants, autour des murs d'enceinte de leur école. Il savait que Pauline Person appréciait ces fleurs blanches, au parfum délicat et sucré. Elle lui avait même dit qu'elles symbolisaient, à la fois, la douceur et l'amour pur et sincère. Le couple Person n'en manquait pas. Et le jardin de l'école, qui faisait leur joie, était à leur image, beau et foisonnant. Il faut dire que le directeur ne renonça à aucun de ses rêves, ni à aucune de ses expérimentations, sur ces terres noires qui faisaient la réputation de la Beauce : parterres de fleurs, jardin botanique - fort complet à certaines époques et garni d'étiquettes portant tous les noms scientifiques - jardin maraîcher, et verger servant à nourrir maîtres et élèves, rien n'y manquait. Monsieur Jacques Person-Collard avait même créé une pisciculture, sur les bords de la pièce d'eau, tandis que Messieurs Jules Courtois et Duperche avaient ouvert une école de sylviculture et d'apiculture, dans les massifs du petit bois attenant à l'école.

En ce qui concerne le miel, Augustin avait appris que c'était un produit de transformation, issu d'une longue maturation. Celui qui était réalisé au printemps était doux et clair, alors que celui récolté en été était plus ambré et fruité ; car il contenait, entre autres, des fleurs de tilleul. Pour produire ce miel, les abeilles butinaient de fleur en fleur, puis une fois rentrées à la ruche, les butineuses donnaient leur récolte à d’autres abeilles, en charge d’enrichir le tout en enzymes. Ensuite, des ouvrières faisaient sécher ce miel : elles le régurgitaient plusieurs fois, l’étalaient en couche avec leur langue, entreposaient tout cela dans des cellules, et le laissaient murir. Les abeilles ventileuses faisaient ensuite rentrer de l’air extérieur ; et enfin la colonie faisait monter la température à plus de trente degrés Celsius. Ce processus réduisait la teneur en eau du miel en quatre jours. Une fois pleine, la cellule était recouverte de cire pour être protégée. Voilà un condensé de ce qu'on pouvait découvrir, apprendre et expérimenter, en théorie et en pratique, dans cette fabuleuse école. À l'image de l'exceptionnelle personnalité du directeur, les leçons de choses, en intérieur, comme en extérieur, étaient aussi savoureuses et enrichissantes que le miel, aussi brillantes et précieuses que les diamants, et aussi douces que les pétales de roses blanches, qui grimpaient sur les murs de la propriété du faubourg d'Illiers.

Ses efforts pour propager le goût de l'horticulture, son intérêt pour l'archéologie et sa rigueur pour enseigner les sciences et la grammaire firent la renommée de Jean-Baptiste Person. Sans en prendre conscience et en conservant une humilité déconcertante, cet homme devint un phare éclairant Chartres et ces alentours. Et si vous lui demandiez le secret d'un tel succès, comme Pierre et Louise Thomin, il vous montrait du doigt le ciel, suggérant ainsi que tout ce qu'il possédait lui venait de Jésus-Christ. Comme il aimait l'expliquer, il n'était que la fontaine dans laquelle l'eau passait. Toutes ses sources étaient divines. Et cette foison de vie et de grâce imprégna les âmes avides d'une multitude d'élèves-maîtres, durant bien des années. Sans qu'il recherche jamais une quelconque notoriété, sa réputation gagna cependant tout l'Eure-et-Loir. Ainsi, le jeune directeur devint l'ami des plus éminents personnages du département,  tel Monsieur Billard de Saint-Laumer, le maire de Chartres, qui fut aussi fondateur et président des sociétés d'archéologie et d'horticulture, dont Jean-Baptiste devint membre.

Certes, Jean-Baptiste n'avait, à aucun titre ni à aucun degré, la haute compétence qu'apportaient chacun des ingénieux érudits dans leur domaine ; mais il cherchait toujours plus à s'instruire, pour être d'une manière ou d'une autre utile au corps enseignant. Ainsi, prenant avec pertinence une part active et utile à toutes les questions d'organisation et de règlement, il se joignait aux brillants savants, avec une ardente curiosité et une grande déférence. Il savait que Dieu seul lui donnait ces opportunités, et il ne se laissait jamais émouvoir ou influencer par le prestige du pouvoir ou de l'argent. Plusieurs fois, il rencontra les ministres Guizot[7], de Falloux[8], ou le baron Lacrosse[9], auxquels il partagea ses pensées au sujet des écoles normales. Cette preuve d'intérêt et de bienveillance, qu'un ministre donnait à l'école en la visitant, apportait du courage et de l'espoir aux élèves et aux maîtres, mais Jean-Baptiste Person ne se laissait pas impressionner par ces fastes. Une fois, même, il apostropha le Prince-président Louis-Napoléon Bonaparte[10] qui venait de comparer les instituteurs à des apôtres des idées démagogiques[11]. Il lui répondit avec aplomb, que l'immense majorité des instituteurs n'avait cessé en aucun temps d'être attachée à ses devoirs, de remplir dignement sa mission, et qu'il s'en portait garant. Ces paroles firent une vive impression sur l'assistance, mais Jean-Baptiste ne se laissa jamais affecter par une quelconque fierté. Ce qu'il désirait par-dessus tout, c'était défendre sa profession, et faire de son école un vivier de connaissances et de talents propres à bénir l'Eure-et-Loir.

Même si Augustin ne fut jamais à la hauteur des compétences d'administrateur et de maître-adjoint de son ami Person, il but chacune de ses paroles, et s'inspira de chacun de ses faits et gestes, pour diriger sa classe, dans les différentes écoles de campagne, où il fut ensuite affecté. Plus qu'un exceptionnel directeur d'école et qu'un excellent professeur, Jean-Baptiste fut son ami pour la vie, le modèle qu'il suivit modestement, et l'inspirateur de toutes ses pédagogies. La portée de son influence alla même au-delà de sa profession, qui devint, grâce à lui, une véritable vocation. Le jeune directeur marqua profondément son caractère et l'éducation qu'il donna, plus tard, à son fils unique.

Voilà pourquoi, ce fils, qu'il nomma Marc Emmanuel, étudia lui aussi à l'école normale d'instituteurs, faubourg d'Illiers, puis devint maître-adjoint auprès de Jean-Baptiste Person, avant d’être à son tour directeur d'une école normale d'instituteurs. Si on lit sa monographie, écrite en 1897, on voit à titre posthume et en filigrane[12] l'œuvre de Jean-Baptiste paraître dans toute la pédagogie et les attraits de Marc Emmanuel. Sa rigueur, sa morale, son amour pour le dessin, l'archéologie et l'horticulture ont traversé les années, et se sont transportés jusqu’à Troyes, en faveur d'une grande quantité d'élèves et de maîtres.

Si certains, comme Augustin, ne furent que de modestes bougies, éclairant quelques enfants dans les campagnes beauceronnes, d'autres devinrent d’éminents professeurs ou des directeurs d'école, embrasant des multitudes d'enfants de leurs lumières divines et de leurs sciences, comme des phares au bord de l'océan. Hissant leurs couleurs[13], contre vents et marées, en temps de guerre ou de paix, quand les circonstances firent de leur art un âge d'or, ou quand les épidémies[14] et les crises politiques les malmenèrent, Jean-Baptiste, Augustin et Marc Emmanuel gardèrent le cap. Ils restèrent jusqu'au bout sur le pont de leur bateau, s'efforçant à brandir haut et fort leurs convictions, leur morale et leur enseignement, telles des oriflammes bravant le sombre ennemi libertaire[15]. Ils combattirent jusqu'à la mort l'ombre des funestes lois à venir, car ils pressentaient la victoire des républicains et la redéfinition des écoles normales. Ils pensaient que cela conduirait à une déchristianisation de l'instruction publique,  induisant une perversion de la petite enfance, entraînant un chaos anarchique et la mort de leur pays. Ils ne formèrent pas seulement des instituteurs certifiés, mais des hommes, tels que Rudyard Kipling put les dépeindre dans son fameux poème.

- Ce n'est pas un diplôme, un travail ou même un mariage qui fait un homme, mais son attitude ! disait souvent Jean-Baptiste à ses élèves. Et ce n'est pas dans l'abondance des actes, mais dans l'être profond que se distingue un homme de valeur. Ce n'est que dans l'intimité avec Christ que la perfection peut finalement s'accomplir. Sans l'aide du Saint-Esprit, vivant dans un cœur, le succès est illusoire, et les conditions requises ne sont que des pierres d'achoppements.

 Augustin l'avait bien compris, c'est pourquoi son brevet en poche, il n'oublia jamais les leçons de son ami Person, et resta fidèle à Christ. Néanmoins, ce que les deux amis avaient pressenti avec horreur, arriva finalement quelques années après leur mort. Avec l'arrivée de Jules Ferry au ministère de l'instruction publique, puis à la présidence du conseil, en 1879, la loi Bert redéfinit effectivement les écoles normales. Alors, l'institution bannit rapidement l'enseignement biblique, pour se consacrer à sa nouvelle mission : instruire la population française, en lui inculquant non pas des valeurs chrétiennes, mais celles de la république. Comme l'avait annoncé Jean-Baptiste Person, l'état se donna les moyens pour arracher la foi des cœurs, en utilisant les écoles normales. Et ces nouvelles institutions remplirent pleinement leurs obligations, en formant une infanterie de maîtres et de maîtresses d'école convaincus de la dignité de leur devoir, pour démanteler[16], en quarante ans, toute trace de la bible dans l'enseignement. Ce qui avait tourmenté Jean-Baptiste, pendant des années, arriva : il s'était souvent senti comme un détachement militaire isolé, presque abandonné, telle une troupe inutile ou un résistant solitaire. Il avait craint ne devenir qu'une archive, un fossile, un simple témoignage du passé, survivant des âges historiques, une leçon avec accolades qu'une lointaine génération découvrirait peut-être, un jour, sous la poussière d'un vieux grenier. Il se sentait extrêmement défavorisé dans la chronologie des générations, comme une arrière-garde non liée au reste de la troupe des générations antiques. Il regrettait d'être la dernière des générations de la France chrétienne et monarchique, s’effaçant pour laisser place à la France laïque et démocratique. Ce n'était pas qu'une question religieuse ou politique. C'était aussi un changement de paradigme et d'éthique qui anéantirait tout. Il en était certain : après sa mort commencerait un autre âge, un autre monde issu de la philosophie des Lumières[17] et de la Révolution française ; un monde moderne et libertaire, de ceux qui ne croiraient plus en rien, et qui s'en feraient gloire et orgueil. Et cela l'effrayait et l'attristait au point de le rendre malade.

Suite

[1] Antérieurs au déluge.

[2] Personnes qui prônent la liberté individuelle, comme valeur fondamentale, et qui de ce fait, rejettent toute forme d'autorité dans l'organisation sociale.

[3] Jésus-Christ dans lequel JB Person croyait et duquel il dépendait.

[4] Le fils d'Augustin fut normalien, puis maître-adjoint, c’est-à-dire professeur à l'École normale d'instituteurs de Chartres de 1866 à 1886. Ensuite, il devint directeur de l'école normale d'instituteurs de Troyes dans l'Aube.

[5] D'après l'évangile de Luc 6.45.

[6] L'expression "main de fer dans un gant de velours" vient en effet de Jean-Baptiste Bernadotte, un Français devenu roi de Suède et de Norvège sous le nom de Charles XIV, en 1818. Il avait dit : "Il faut, pour gouverner les Français, une main de fer recouverte d’un gant de velours".

[7] Véritable chef du gouvernement, sous la présidence nominale du vieux maréchal Soult de 1840 à 1847, il tint successivement les ministères de l'intérieur, de l'Instruction publique, puis des Affaires étrangères.

[8] Ministre de l'Instruction publique et des cultes en 1848.

[9] Ministre de l'Agriculture et des travaux publics en 1848-1849.

[10] C'était en 1849, un an après son élection.

[11] Des propagateurs d'idées flatteuses, cherchant à gagner des adhérents et à augmenter leur popularité.

[12] Par transparence.

[13] Ils montraient leur identité par la couleur bleue de leurs uniformes, tels des marins hissant leur drapeau pour identifier leur pays de provenance. Ces uniformes bleus comme le ciel différaient de l'uniforme civique noir et sévère des normaliens de la république, qui formèrent plus tard un régiment inépuisable d'enseignants laïques, que Charles Péguy surnomma les hussards noirs.

[14] Epidémie de choléra entre 1849 et 1850. 70 personnes en moururent à Chartres et JB Person en souffrit. Il y eut aussi des épidémies de rougeole et de typhoïde.

[15] Jean-Baptiste continua à travailler pendant six ans au-delà de l'âge légal de la retraite (60 ans pour les fonctionnaires civils de l'état dès 1853) et il mourut un an après avoir cessé ses activités.

[16] Démantèlement relatif, car les associations (religieuses ou non), créées à cet effet, eurent alors toute liberté pour créer et gérer légalement des écoles privées dites "libres ".

[17] Le mouvement des Lumières a été, en grande partie, un prolongement des découvertes de Nicolas Copernic au XVIe siècle, puis des théories de Galileo Galilei (1564-1642). Une quête d’axiomes, de certitudes éprouvées, se poursuivit dans le mouvement du cartésianisme tout au long du XVIIe siècle. Il fut également un élément important dans la constitution d’une philosophie où le concept d’individualité et d'anticléricalisme prévalait.


[1] D'après la biographie : "Jean-Baptiste-Édouard Person : instituteur primaire et chef d'institution à Versailles, directeur des Écoles normales d'Albi (Tarn) et de Chartres (Eure-et-Loir) : 1805-1877" écrite par son fils Paul Léonce Person (1843-1887) professeur au lycée Saint Louis à Paris.

[2] Local où l'on repassait le linge.

[3] Moyen d’enseigner les sciences à partir de l’observation du quotidien, en reproduisant des schémas, en faisant des expériences, des herbiers et divers travaux pratiques…

[4] Local où l'on range le bois à brûler.

[5] Local réservé à la lessive.

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