lundi 11 juin 2018

Des enfants en colère

 18 pistes pour accompagner les colères des enfants avec bienveillance

Les crises sont générées par des besoins qui ne sont pas comblés (fatigue, faim, besoin de contact, de pouvoir sur la situation…). 
Le fait de se dire que la crise est une réaction face à une situation donnée est plus aidant que le fait de se dire que l’enfant est capricieux.

Par ailleurs, la colère n’est pas une émotion à éviter ou étouffer à tout prix. 
Elle a une fonction réparatrice qui permet de se remettre d’une frustration ou d’une attaque de l’intégrité. 
Il convient donc de la reconnaître comme une émotion vitale et légitime, sans pour autant accepter les comportements à problème (taper, insulter, casser des choses…).


1. L’enfant apprend par imitation
Nous pouvons offrir un modèle à nos enfants. 
Cela passe par le fait de reconnaître notre propre colère sans culpabiliser ou accuser l’enfant d’être la cause de cette colère : on vise ici l’expression responsable de la colère. 
Il est normal de ressentir de la colère et il n’y a pas à en avoir honte. 
De même, on pourra exprimer notre joie ou notre tristesse quand le contexte s’y prête.
Par ailleurs, on peut montrer à l’enfant ce qu’on fait quand on est frustré ou en colère. 
Vous pouvez le faire sous forme de récit (ou encore mieux en situation) :
« J’étais en colère parce que…. J’ai dit « grrr » dans ma tête, j’ai pris trois grandes respirations pour me calmer, je me suis isolé(e), j’ai réfléchi à une solution à mon problème et j’ai décidé de… »


On pourra varier les mots utilisés pour décrire notre état émotionnel et celui des autres. 
On pourrait même faire une liste avec les enfants pour décrire les différents degrés de la colère du moins fort au plus fort : pas content, mécontent, contrarié, dérangé, ennuyé, irrité, fâché… 
On encouragera les enfants à utiliser ces mots pour nommer ce qu’ils ressentent.


Il est constructif de lire des contes avec les enfants qui abordent le thème de la colère et d’en discuter avec lui. On pourra faire remarquer la couleur du visage, les poings fermés ou toute autre réaction physique des personnages ainsi que les mots utilisés pour exprimer la notion de colère.
On pourra en profiter pour poser des questions aux enfants sur les situations qui ont déclenché la colère du héros, sur les conséquences de ses actes et sur la façon dont il a affronté ses problèmes.

4. Remarquer les manifestations physiques des émotions
On pourra aider l’enfant à remarquer comment son corps réagit à la colère en décrivant les réactions et en les associant à l’émotion :
« Tu cries, tu as l’air en colère », « Ton visage est rouge, tu es fâché », « Tu fronces les sourcils, j’ai l’impression que tu vas t’énerver », « Tu es en colère, tu sens la boule dans ton ventre et dans ta gorge/ ta respiration s’accélérer ? »


5. Préparer l’enfant à l’éventualité d’une déception
En prévenant l’enfant d’une éventuelle déception ou frustration, on l’aidera à affronter sa colère.
Par exemple : « Il est possible que ton copain/ ta copine ne puisse pas répondre à ton invitation. 
Peut-être que tu seras déçu(e). Qu’est-ce qu’on pourrait faire alors ? »

6. Enseigner une technique de gestions des émotions : « la technique de la tortue »
Sylvie Bourcier propose dans son livre la technique de la tortue pour apprendre aux enfants à réagir sans explosion à la colère. 
Cette technique peut être appliquée avec des enfants dès 3 ans 1/2.
Il s’agit d’inviter l’enfant à imaginer qu’il est une tortue qui se retire dans sa carapace. 
Il place ses bras le long de son corps, il baisse la tête et ferme les yeux.

Situations au cours desquelles utiliser la technique de la tortue :
– L’enfant ressent de la colère envers un camarade et pense qu’il pourrait se montrer violent,
– L’enfant ressent de la colère envers lui-même et anticipe une crise explosive,
– L’adulte invite l’enfant à faire la tortue en disant juste « tortue »,
– Un enfant dit « tortue » à un autre enfant avant qu’une dispute éclate entre eux.

9 étapes à enseigner aux enfants :
  • 1. Reconnaître que je suis fâchée : « Oui, c’est vrai que je ressens de la colère, j’ai les mâchoires serrées, la tête qui bouillonne, les poings serrés »
  • 2. Penser « Ma colère est là et c’est une visiteuse de passage »
  • 3. Aller me retirer dans ma carapace
  • 4. Prendre de grandes respirations (gonfler le ventre, souffler comme pour faire des bulles de savon) : « Je me détends afin d’affronter les frustrations et je respire avec des grandes inspirations et expirations. Je deviens mou/molle. » Il est amusant de proposer aux enfants de pratiquer cette décontraction en s’imaginant comme une poupée de chiffon qui s’effondre ou un spaghetti qui devient mou en cuisant.
  • 5. Penser au calme et réfléchir à la situation précise : « C’était un accident », « Mon copain n’a pas fait exprès », « Il m’a dit ça parce qu’il est triste en ce moment », « Je suis capable de trouver une solution »
  • 6. Sortir de la carapace quand je me sens calme
  • 7. Penser à des solutions
  • 8. Choisir une solution qui me convient
  • 9. Appliquer la solution et me féliciter du résultat

7. Aménager le quotidien
Les enfants ont besoin d’avoir un peu de contrôle sur la situation. 
Les enfants sont souvent frustrés car ils se retrouvent la plupart du temps dans une position de contrainte. 
Leur redonner du pouvoir personnel peut passer par la possibilité pour eux de prendre des décisions, de faire de choix (« tu préfères mettre ton maillot vert ou ta chemise bleue aujourd’hui ? », « on prend le chemin de la mairie ou celui de la Poste pour rentrer ? »).


8. Reconnaître l’émotion qui a suscité la crise
On peut accepter et reconnaître l’émotion puis la nommer à l’enfant pour qu’il apprenne à mettre les bons mots sur ses émotions.
« C’est difficile de… »
« Tu es fâché parce que… »
« Tu as le droit d’être fâché, mais je ne peux accepter que tu… »
« Tu peux t’exprimer avec tes mots/ tu sais le dire avec des mots alors fais le »

Il est préférable d’éviter de banaliser (« ce n’est rien… ») ou de disqualifier (« tu te fâches pour rien… ») la colère (et toute autre émotion). 
C’est par la reconnaissance et l’acceptation de nos émotions et celles des autres qu’on apprend l’empathie.
Par ailleurs, les émotions sont des signaux d’alarme (la colère pour les frustrations, la peur pour les dangers, la tristesse pour les pertes et insatisfactions, la jalousie pour les écarts entre nous et les autres…). 
Elles ont donc un rôle et ne sont pas à évacuer de nos vies.


9. Faire parler ou dessiner l’enfant
On peut poser des questions à l’enfant avec un dessin comme support : « tu es en colère comment ? » , « tu es en colère comme ça ou comme ça ? »
Quand l’enfant apprend à s’exprimer par des mots ou des dessins, il peut dire qu’il est en colère sans passer par des crises de rage ou de violence. 
Le parent peut alors « accuser réception » : « Ok, j’ai entendu que tu n’es pas content(e) ».


10. Tous les sentiments sont acceptables
L’enfant a le droit de se mettre en colère.
Ephésiens 4.26  "Si vous vous mettez en colère, ne péchez point; que le soleil ne se couche pas sur votre colère."
Plus l’enfant essaie de se contrôler, plus il encaisse et il finit par exploser. 
Or les parents ne voient pas forcément tous les moments où l’enfant a fait des efforts pour se contrôler : ils ne voient que les crises d’explosion si violentes qu’ils en viennent à se demander si l’enfant est normal.
Il est possible de dire à l’enfant  « je vois que quelque chose ne va pas » pour désamorcer une crise et engager la discussion (sans forcer l’enfant; parfois la simple reconnaissance de son vécu suffira).

11. Ecouter et s’intéresser à ce que vit l’enfant dans le moment présent
L’écoute active consiste à reformuler les mots de l’enfant sans les dénaturer, à exprimer les sentiments de l’enfant sans apporter de réponse à ses problèmes et à acquiescer avec des « ah », des « hum », des « oh », des « je vois ».
Pour apprendre à pratiquer l’écoute active, le livre Parents efficaces de Thomas Gordon me semble le plus abordable (à la fois en termes de contenu et de prix).

12. Une question à poser aux enfants pour les familiariser avec l’empathie
A ton avis, comment je me sens ? Quel est le problème pour moi ? Pour engager la discussion et inciter l’enfant à réfléchir.


13. La boîte à cris
Tous les membres de la famille peuvent exprimer leur mécontentement dans la boîte en criant dedans à travers le trou. 
Une fois la boîte remplie, on va dehors pour jeter les cris.

14. Le coussin de colère
Pour verser sa colère sur un objet symbolique. 
Lever les deux mains jointes en l’air en prenant une inspiration, baisser les deux mains sur l’expiration. 
L’idée est d’éviter d’associer la colère au fait de taper en encourageant des manifestations violentes de la colère.
15. Les lettres de colère
Les plus grands peuvent écrire des lettres avec leurs propres mots pour soulager leur colère. 
La lettre n’a pas pour objectif d’être donnée mais simplement de mettre des mots sur les émotions.

Il est possible de créer des cartes avec les émotions et les sentiments les plus courants, illustrées par un dessin ou une photo de l’enfant qui imite cette émotion.
Voici quelques émotions et sentiments liés à des besoins satisfaits : étonné, plein d’énergie, content, joyeux, inspiré, optimiste, soulagé, surpris, touché, à l’aise, plein d’entrain, comblé, ému, fier, confiant, reconnaissant…
Voici quelques émotions et sentiments liés à des besoins non satisfaits : fâché, désorienté, déçu, frustré, irrité, nerveux, perplexe, triste, ennuyé, préoccupé, découragé, embarrassé, impuissant, impatient, seul, mal à l’aise…

La roue des choix est un outil visuel qui présente de façon ludique différentes solutions pour gérer un problème ou accompagner une émotion forte. 
En voici un exemple ci-dessous (mais d’autres idées pourraient être ajoutées comme le dire à quelqu’un, marcher, m’asseoir seul dans un endroit que j’aime bien, chiffonner un papier et le lancer…) :

L’idée est de proposer aux enfants un espace de retour au calme plutôt qu’un isolement au coin.

Aristote disait: « N’importe qui peut se fâcher, c’est facile. Mais se fâcher contre la bonne personne, pas trop ni trop peu, au bon moment, pour une raison valable, et de la bonne manière-cela n’est pas facile ! »

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