samedi 13 septembre 2014

Un enfant gisant sur un monceau d'ordures

D'après le témoignage de Stephanie Fast


Dépouillée de tout espoir et de toute dignité, battue et mal nourrie, l’enfant de six ans, abandonnée, gisait sur un monceau d’ordures, aspirant à la mort.
Quand tout-à-coup, venant de nulle part, un rayon de soleil perça le trou noir qui l’enveloppait.
La ville de Daejon s’éveillait tout juste et essayait d’oublier le cauchemar de la guerre de Corée, à l’instant même où Stephanie, petite fille de huit ans, se glissait à travers les portes de l’orphelinat, aux premières lueurs du jour.
Ses bras maigres encerclaient un ballot de chiffons malodorants.
Comme elle était la plus âgée de l’orphelinat, elle avait la charge de laver toutes les couches.
Elle marcha deux miles jusqu’à la rivière, où elle lava les couches en les battant avec un bâton plat et en les faisant tremper dans l’eau glacée qui l’encerclait. Ce n’est qu’en milieu d’après-midi qu’elle retourna à l’orphelinat pour les étendre.
C’était un travail dur, mais cela ne déplaisait pas à Stephanie.
Particulièrement aujourd’hui. Hier, l’infirmière suédoise, Iris Erickson, lui avait dit: “S’il te plait, aide-nous à préparer tous les enfants. Les étrangers vont venir.”
Le long du chemin de l’orphelinat, une nuée d’enfants suivaient Stephanie et lui criaient comme d’habitude “Toogee! Toogee!” Elle ne leur fit prêta pas attention et continua à marcher, les pensées tournées vers tout ce qui restait à faire à l’orphelinat.
 
Stephanie avait l’habitude d’être insultée par les gens dans la rue, et elle croyait intérieurement que cet horrible mot “toogee” était son nom, sa véritable identité.
Cela voulait dire en français “démon étranger”.
“Je croyais que j’étais la plus basse des choses qui pouvaient exister”, raconte Stephanie.
“Je croyais que j’étais pire qu’un chien ou qu’un porc et que mon visage était difforme et ridicule”.
Mais c’étaient ses cheveux frisés et ses grands yeux brillants qui faisaient que les gens la haïssait.
Pour les Coréens, elle était en effet une “enfant d’étrangers”, un “démon”, issue d’un soldat américain.
Elle était un souvenir de tout ce qu’ils cherchaient à oublier.
 
Un espoir pour l’avenir
 Le carillon résonna dans toute l’enceinte. “J’espère que nous n’avons rien oublié”, pensait Stephanie.
Elle avait passé des heures à nettoyer les bébés, à essayer de les rendre aussi jolis que possible, au point qu’elle avait même mis des petits rubans dans les cheveux des filles.
“Un de ces bébés va partir en Amérique”, se disait-elle, l’oreille tendue pour entendre les voix qui parlaient de l’autre côté de la porte. “Et ce bébé-là a de l’avenir”.
La porte s’ouvrit en grinçant et les employés guidèrent le couple d’américains à l’intérieur.
Ils avaient déjà visité six orphelinats à la recherche d’un petit garçon à adopter.
Ils lui avaient même déjà choisi un prénom: Stephen.
 
Stephanie dévisageait le couple qui arrivait et la crainte et l’étonnement saisirent entièrement les 15 kilos de son corps.
Elle avait déjà vu des Américains, des soldats et Mademoiselle Erickson, l’infirmière aux yeux bleus qui l’avait sortie de la rue et amenée à l’orphelinat deux ans plus tôt.
Mais ces gens qui arrivaient maintenant n’avaient rien à voir avec les Américains qu’elle avait pu rencontrer auparavant. “C’étaient les personnes les plus grandes, les plus rondes et les plus étranges que j’avais jamais rencontrées”, se souvient Stephanie. Stephanie regardait, fascinée, le grand homme prendre un petit bébé dans ses bras. Elle vit alors quelque chose qu’elle n’avait jamais vu dans toute sa vie, des larmes inonder le visage d’un homme. Sans comprendre pourquoi, Stephanie s’approcha de lui. Elle s’arrêta, saisie, quand il la regarda et rencontra son regard.
Il s’accroupit en face d’elle et lui parla doucement en anglais, mais elle ne comprenait pas les bruits qui sortaient de ses lèvres. Ses cheveux couverts de poux étaient plus blancs que bruns.
Elle était pleine de furoncles et de plaies ouvertes.
Elle avait des vers qui sortaient parfois de ses oreilles et de sa bouche et son œil gauche roulait paresseusement dans son orbite.
 
La grande main de l’homme s’approcha subitement de son visage.
Il toucha sa joue et la recouvrit comme d’une douce couverture. Malgré la douceur du geste, cela la frappa.
“Mon cœur fit la culbutte”, se souvient Stephanie.
“Je voulais lui dire: N’enlève pas ta main, s’il te plait, aime-moi!” Mais elle repoussa la main et s’écarta.
 
Un sombre passé
 Quand elle vivait dans la rue, avant de venir vivre à l’orphelinat, Stephanie avait décidé que quoi qu’on fasse à son corps, elle n’aurait jamais mal à l’intérieur.
Elle avait appris à ne pas pleurer quand des fermiers l’avaient attachée nue à un arbre et laissé les enfants enfoncer des bâtons dans différents parties de son corps pour voir comment elle réagissait à la douleur.
“Il ne faut pas laisser voir votre peine aux autres, parce que plus ils vous voient souffrir, plus cela leur donne du plaisir”, explique-t-elle.
“Dès l’âge de six ans, j’étais morte émotionnellement”.
Depuis que sa mère l’avait abandonnée – Stephanie croit se rappeler que sa mère l’avait laissée seule dans un train quand elle avait quatre ans – elle fuyait de village en village.
Elle dormait dans des caves ou sous des ponts et pour se nourrir, elle faisait griller des sauterelles et suçait la moelle des os que les bouchers jetaient.  
 
Stephanie voulait survivre et ne perdait pas l’espoir que sa mère ou son père l’attendait quelque part.
Mais la plupart des villageois coréens la chassaient.
Car elle était un rappel odieux d’une guerre odieuse.
Un jour, un groupe d’homme l’avait attachée à une roue à eau, dans l’espoir de la noyer.
A force de tourner, sa bouche se remplissait de boue et de sang, rouée de coups et sous les rires des gens.
Elle avait ensuite entendu la forte et profonde voix d’un homme qui leur disait d’arrêter.
L’homme l’avait détaché et lui avait dit: “Cours, petite fille, cours.Ces gens te veulent du mal”.
Même maintenant, elle se demande si ce n’était pas un ange.
 
Dans la ville, Stephanie était devenue habile à dérober de la nourriture sur les marchés.
Mais elle avait été prise une fois, parce qu’elle portait une petite fille qu’elle avait trouvée dans la rue.
“Je me souviens avoir été saisie par un homme et tirée par les cheveux, et il disait: ‘C’est encore ce sale petit diable’.
Il m’avait en quelque sorte reconnue”.
Stephanie et la petite fille avaient été jetées derrière un mur dans un bâtiment infesté de rats.
“Je tenais la petite fille en me balançant et en hurlant”, raconte Stephanie.
“Je me suis évanouie, probablement d’effroi. Je ne sais pas combien de temps je suis restée inconsciente, mais quand je me suis réveillée, j’ai vu de mes yeux de petite fille de six ans que les rats avaient mangé une partie de la petite fille”.
Et quelqu’un avait miraculeusement sauvé Stephanie.
Peu de temps après, Stephanie avait attrapé le choléra.
“Arrivée à l’âge de sept ans, je ne voulais plus que mourir”, se souviens Stephanie.
“Je savais en quoi consistait mon avenir, je me haîssais ainsi que tout ce qui m’entourait, particulièrement les gens.
Je ne vouais plus être abusée”.
C’est alors qu’en 1960 Iris Erickson la trouva étendue sur le monceau d’ordures et qu’elle l’emmena vivre à l’orphelinat.
Deux ans plus tard, les américains David et Judy Merwin venaient pour adopter un bébé.
 
A la maison“Tu ne me croiras pas,” disait David Merwin à sa femme Judy sur le chemin du retour après leur visite à l’orphelinat, “mais j’ai l’impression que nous devrions adopter cette petite fille, tu sais, celle qui ma craché dessus”.
Judy Merwin  rit. Elle avait la même chose dans le cœur et elle sentait que cela venait de Dieu.
Alors les Mervin retournèrent le lendemain à l’orphelinat et la petite fille devint leur Stephanie.
 
Du jour au lendemain, Stephanie a eu sa propre chambre et son propre lit.
Du jour au lendemain, Stephanie a eu une identité.
Elle était maintenant Stephanie Merwin. Elle était américaine.
Stephanie a rapidement découvert que les Américains aiment les gens qui sourient beaucoup.
Dans un groupe d’amis, elle était toujours la plus gaie.
En grandissant, elle décolora ses cheveux et demanda à sa mère de lui acheter des verres de contacts bleus, afin qu’elle puisse ressembler à une Américaine.
“Mais je ne me sentais ni coréenne, ni américaine et je savais au fond de moi que je n’étais qu’un sale et laid démon”, admet Stephanie.
 
Les parents de Stephanie ne savaient pas grand chose de son passé.
  Ils ne savaient que ce que l’orphelinat leur avait dit, qu’ils l’avaient trouvée dans la rue et qu’elle était eurasienne.
Mais quand après avoir passé un an aux Etats-Unis, ils sont retournés en mission en Corée, ils ont été surpris de voir que Stephanie s’asseyait toujours au fond de l’église les bras croisés et qu’elle refusait de parler aux Coréens.
Elle voulait à tout prix oublier son passé. Et son apparence heureuse s’est effacée à la fin de son adolescence.
Elle se mit à repousser tout le monde et chaque fois qu’elle parlait d’elle, elle n’avait que des propos négatifs.
“J’étais remplie d’amertume, de confusion et de peine intérieure”, raconte Stephanie.
“Mais je ne permettais à personne de mettre le doigt dessus, ni à mes parents, et encore moins à Dieu”.
 
Un jour, son père est monté dans sa chambre et s’est assis au pied de son lit.
Il lui a dit: “Je veux te parler encore une fois de Jésus”.
Stephanie se souviens d’avoir pensé: “Eh, je suis en train de devenir une encyclopédie sur Jésus! J’ai été à l’église toute ma vie, j’ai été baptisée. Je n’ai besoin de rien d’autre”.
Mais Stephanie a écouté son père qui lui parlait doucement. Il lui parlait de la façon dont Jésus avait quitté le ciel pour venir sur terre, de comment il avait été conçu hors mariage dans une vierge.
“Il m’a aussi demandé si j’avais pensé à l’endroit où Jésus était né”, raconte Stephanie.
“La crèche n’était pour moi qu’un décor de théâtre pour la pièce de Noël qui revenait chaque année.
Je ne me rendais pas compte que c’était une cave sombre et sale qui n’était jamais nettoyée et que tout ce qu’il avait eu comme lit était une mangeoire”.
Le père de Stephanie lui expliqua ensuite comment le roi Hérode voulait tuer Jésus quand il était un petit enfant, à cause de ce qu’il représentait, et comment plus tard même ses plus proches amis l’avaient rejeté.
 
Stéphanie se mit à pleurer quand elle réalisa à quel point Jésus avait été abusé, puis tué, dans le but de pouvoir s’identifier à elle.
C’était la première fois qu’elle pleurait depuis qu’elle avait été jetée dans le bâtiment infesté de rats.
Elle se mit à prier, ouvrit sa vie à Dieu et Lui demanda de prendre tout son passé, de lui pardonner ses péchés et de la restaurer.
Ce fut le début de la guérison qui est encore en train de se produire dans la vie de Stephanie.
Quand elle a épousé Darryl juste après le lycée, il s’avait qu’elle avait été adoptée, mais il n’avait pas la moindre idée de ce qu’elle avait réellement vécu dans le passé.
Quand Stephanie a commencé à faire des cauchemars, Darryl savait que c’était bien plus que de simple mauvais rêves. Stephanie s’est confiée à lui et ils ont commencé à travailler sur son passé et à prier ensemble que Dieu les aident et la guérisse.
 
Une partie de la guérison est venue depuis que Stephanie a commencé à partager publiquement son histoire.
Elle se soucie particulièrement des femmes qui ont vécu des relations abusives et qui en ont souvent des problèmes d’identité. Stephanie est devenue conférencière et s’adresse régulièrement à des groupes de femmes dans le monde entier, groupes avec lesquelles elle partage son témoignage, même en Corée.
Quand elle parle de son passé, Stephanie s’émerveille toujours d’avoir survécu à tous ce qui lui était arrivé dans son enfance et elle se rends compte à quel point elle a de la chance d’être en vie et de faire ce qu’elle fait aujourd’hui.
“Ce qui est amusant, vous savez, c’est que chaque fois que j’ai eu un problème, il y a toujours eu quelqu’un pour me sauver”, raconte Stephanie.
“Et la personne qui me secourait me disait toujours: ‘Tu dois vivre, petite fille.’Je ne sais pas si c’était des anges ou simplement des gens que Dieu utilisait, mais je sais que Dieu a préservé ma vie. Dieu ne m’a jamais abandonnée. Et je sais maintenant qu’il ne m’abandonnera jamais.”
 
Qu’en est-il de vous?
Avez-vous des cicatrices qui ne guérissent pas?
Est-ce que votre passé vous empêche d’envisager l’avenir?


Cela n’a pas besoin d’être ainsi.
Vous pouvez obtenir la paix et la plénitude à travers une relation personnelle avec Jésus-Christ.
Vous pouvez recevoir Christ dès maintenant par la foi, au moyen de la prière.Prier, c’est tout simplement parler à Dieu. Dieu connaît votre cœur, et il est plus soucieux de l’attitude de votre cœur que des mots que vous utilisez.

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